top of page

L’hôpital Albert-Chenevier (AP-HP) mise sur la réalité virtuelle

Plus de 40 hôpitaux et centres de rééducation en France sont aujourd’hui équipés du dispositif médical de rééducation en réalité virtuelle KineQuantum. L’hôpital Albert-Chenevier de Créteil (94), l’un des 5 établissements des Hôpitaux universitaires


Henri-Mondor, a été parmi les premiers à investir dans cet outil innovant. Un protocole de recherche y a été lancé pour tester son efficacité sur les patients lombalgiques chroniques.



Le dispositif KineQuantum comporte plus de 90 exercices permettant de mobiliser tous les membres et le rachis.

Depuis avril 2019, l’une des pièces de l’unité de rééducation ostéoarticulaire (40 lits), située au premier étage du bâtiment Paul Ravaut, est dédiée à l’utilisation du dispositif KineQuantum. À l’initiative de cette acquisition, financée par l’association Neuroloco* avec l’appui d’un ancien patient, le Dr Shahab Fardjad, responsable du service, avoue avoir été longtemps “réticent” à l’utilisation de la réalité virtuelle en rééducation. Jusqu’à ce qu’il teste la solution à l’occasion du congrès de la Société française de médecine physique et réadaptation (Sofmer)** en 2018. “À travers sa dimension ludique, j’ai tout de suite senti son potentiel pour de nombreuses indications, dont les troubles de l’équilibre”, explique-t-il.


Si tous les rééducateurs ont été formés à l’utilisation du dispositif, c’est principalement Aurélie Clair, psychomotricienne, qui s’en sert. “J’assure essentiellement des séances individuelles, à l’inverse des kinésithérapeutes qui prennent en charge 3 patients à la fois sur le plateau technique et pour qui il est compliqué de bloquer 45 minutes pour une seule personne”, justifie-t-elle. Christel Kumah, kinésithérapeute, précise que si “ce matériel permet un réentraînement ludique du mouvement dans sa globalité”, cela reste pour elle “un moyen de réadaptation fonctionnelle à n’utiliser qu’en fin de récupération chez un sujet ayant une très bonne capacité physique, tant au niveau articulaire, musculaire que proprioceptif”.


Un remède efficace à la kinésiophobie


Aurélie Clair y trouve une vraie plus-value pour les patients lombalgiques chroniques et ceux qui ont des problèmes d’équilibre, par exemple à la suite d’une pose de prothèse totale de hanche ou de genou. “Les premiers se limitent généralement dans leurs mouvements par peur d’avoir mal en bougeant. Le fait d’être immergés dans un univers virtuel et de faire des exercices qui s’apparentent à des jeux, couplé à l’envie de gagner, permet de détourner leur attention d’une éventuelle douleur et d’avoir une amplitude de mouvements plus importante qu’avec des exercices classiques. Le jeu est un facilitateur qui permet de rompre l’appréhension plus rapidement qu’en ver-balisant. Pour les seconds, la réalité virtuelle permet de travailler l’équilibre via des exercices simulant une descente à ski, par exemple, avec des transferts de poids dans tous les sens. Je peux certes faire le même exercice sans cette technologie, mais les perturbations visuelles associées demandent au patient de s’adapter davantage, ce qui permet de travailler l’équilibre de façon plus intense”, explique-t-elle. Elle y voit aussi un bon moyen d’augmenter l’endurance : “Même si l’exercice en soi est répétitif, le fait d’être plongé dans cet univers fait que le temps passe beaucoup plus vite et le patient prend davantage de plaisir à sa rééducation. Il y a par exemple un exercice où il s’agit d’éviter des branches et sauter par-dessus un tronc : en 2 minutes, le patient fait 40 squats sans trouver le temps long.”


Le Dr Shahab Fardjad, responsable de l’unité de rééducation ostéoarticulaire Henri-Mondor/Albert-Chenevier, et Aurélie Clair, psychomotricienne.


De rares contre-indications


Pour Aurélie Clair, la réalité virtuelle est un outil supplémentaire à sa disposition, qu’elle utilise selon le profil de ses patients, 2 à 3 fois par semaine, ou en alternance avec une séance classique. Il y a des exceptions : ceux présentant des troubles cognitifs et qui peuvent ne pas comprendre les consignes, ou que le port du masque angoisse, et ceux ayant des troubles psychotiques non stabilisés. “La première fois, je fais toujours la séance en position assise pour voir si le patient réagit bien à la réalité virtuelle. Puis, au fil de la rééducation, je modifie les exercices en puisant parmi les 90 disponibles et j’augmente le niveau de difficulté. Nous prenons en charge principalement des personnes âgées, qui ne connaissent pas les jeux vidéo, mais une fois qu’elles ont testé, elles sont souvent enthousiastes.


Afin de voir si la réalité virtuelle a un impact sur la diminution de la douleur chez les patients lombalgiques chroniques, et d’évaluer celui-ci, un protocole de recherche a été lancé il y a quelques mois. “Dans ce cadre, je reçois les patients 4 fois par semaine durant 1 mois et je leur fais faire 8 exercices spécifiques. Sur la trentaine de patients attendus, seuls 4 ou 5 sont passés à ce jour. C’était prévu sur 1 an mais avec la crise sanitaire, nous avons pris du retard”, explique la psychomotricienne, impatiente de connaître les résultats.


L'Hôpital Louise-Michel de Cébat (63) également séduit


Depuis 2 ans, cet établissement de rééducation du CHU de Clermont-Ferrand est équipé de 2 dispositifs KineQuantum, installés dans les salles de kinésithérapie et d’ergothérapie “pour plus de souplesse d’utilisation. Il y a des périodes où on ne s’en sert pas, ou peu, et d’autres où tout le monde veut l’utiliser, selon le recrutement des patients”, explique Éric Francon, kinésithérapeute. Il y voit un outil parmi d’autres, utile pour de nombreuses indications et travailler l’endurance et la répétition de gestes, entre autres. “La réalité virtuelle permet de sortir des exercices de rééducation classiques. C’est pratique pour les patients qui ont du mal à s’impliquer dans leur prise en charge, ou qui trouvent qu’elle est redondante. C’est efficace aussi avec les patients ayant des problèmes de coordination oculomotrice ou souffrant de kinésiophobie, qui dépassent leur appréhension et leurs limites en termes de mobilité”, ajoute Marine Villechenon, ergothérapeute. “En revanche, nous évitons de l’utiliser avec des patients présentant une pathologie neurologique dégénérative, des troubles cognitifs et/ou de l’équilibre trop marqués, des antécédents d’épilepsie ou encore des troubles psychiatriques comme la schizophrénie”, précise Éric Francon.


JEAN-PIERRE GRUEST


* L’association Neuroloco est une association d’intérêt général à but non lucratif fondée par le Pr Jean-Michel Gracies, le Dr Shahab Fardjad et le Dr Catherine Loche pour promouvoir la recherche et les innovations en neurorééducation et en rééducation ostéoarticulaire.


** KineQuantum a remporté le concours de l’innovation de la Sofmer cette année-là.


Retranscription de l'article paru dans "KineActu" le 17 septembre 2020.


Sachez que si vous êtes un établissement public adhérent UniHA vous pouvez vous équiper en en faisant la demande via l’espace documentaire UniHA.

Comments


bottom of page